Les CRIMES du FUTUR

Organe de toi

« Nous vivons une époque radicale, mon garçon. Vous ne la sentez pas ? Vous devez exagérer avec l’époque, exagérer jusqu’au point de rupture. »

David Cronenberg, Consumé, 2016.

Depuis maintenant des années, tel le personnage à l’esprit dérangé de son « Spider », David Cronenberg n’a eu de cesse de tendre des fils entre ses films, de tisser la toile d’une œuvre singulière, autant par la forme que sur le fond du sujet. Il n’aura eu de cesse de chercher la profondeur, d’explorer l’être humain, cette machine molle chère à Burroughs, soumise à la déformation et aux affres de l’usure des ans. Renouant avec le producteur de « Crash », puis de « eXistenZ », il a exhumé un script de vingt ans d’âge, lui a donné le titre d’un de ses premiers métrages, et contemple l’avenir avec circonspection, nous rend complices d’une performance à corps ouvert qu’il a intitulée : « les Crimes du Futur ».  Comme disait Allegra Geller dans « eXistenz » : « it’s gonna be a wild ride… »

Le corps comme objet d’étude, comme théâtre de performance artistique, comme laboratoire des mutations ou d’expérimentations, comme réceptacle des outrages de son époque et cobaye des temps à venir : on peut légitimement se demander ce que David Cronenberg a encore à dire sur la condition humaine. A la lumière de notre temps, tandis que le climat se dégrade, que les ressources s’épuisent, que la pollution ravage et que les guerres dévastent, il entend bien tracer un cap, préfigurant l’humain de demain, cartographiant les voies qui nous guideraient dans le cœur des ténèbres. Animé de cet esprit conradien, Cronenberg se projette jusqu’à une ère indéterminée, jusqu’à une société aux contours approximatifs et aux mœurs déréglées, un futur dans lequel l’humanité s’est affranchie de la douleur. En perdant cette sensation utile à la préservation de l’intégrité physique, hommes et femmes semblent à la fois dépossédés et allégés, débarrassés de la peur mais pas de l’angoisse (« sommes-nous frappés d’obsolescence ? » demande Caprice).

Insatiables jouisseurs, ils sont surtout en quête d’une nouvelle forme d’extase. De même que les amants de « Crash » défiaient la mort pour s’enivrer d’une jouissance fluide et froide comme le métal, les « criminels » de Cronenberg s’adonnent à des caresses au bistouri, des pénétrations d’un nouveau genre ne se limitant pas à la surface du derme et aux orifices du « vieux sexe ». « It is time to stop seeing, it is time to stop speaking, it is time to listen » : les paupières et les lèvres cousues, des dizaines d’oreilles greffées sur la peau, un homme se contorsionne sur la musique drone composée par Howard Shore, très inspiré par la démarche du performer australien Stelarc. Le corps est son mode d’expression, sa matière première. Mais Cronenberg se rit de ces simagrées, il entend aller plus loin. De l’art à l’artisanat, il glisse sur cette ambiguïté en faisant de son personnage central, Saul Tenser, un être capable de fabriquer de nouveau organes, « à la fois homo sapiens et homo faber » comme l’écrivait déjà Serge Grünberg dans son ouvrage sur le cinéaste il y a plus de vingt ans.

C’est la porte ouverte à des bouleversements physiologiques que seule la science-fiction de Cronenberg permet, ouvrant le débat sur la dimension éthique et morale des « crimes » perpétrés. Un enfant né avec des organes lui permettant d’ingérer du plastique est-il encore humain ? Sous la lentille du réalisateur canadien, il devient l’objet de toutes les attentions, une curiosité médiatique exhibée comme dans les anciennes académies scientifiques, lorsque l’on disséquait les cadavres en public : ce qui est sûr, c’est que le « Brecken show » jette un froid sur le film. Il est aussi terriblement difficile de s’identifier à un personnage de cet univers glauque, peuplé d’êtres aux desseins cryptiques, noyés dans cet environnement de râles et de succions où s’affrontent plusieurs visions de l’avenir. Pas de Max Renn avalé par l’écran du « Vidéodrome » à qui se raccrocher, pas de Ted Pikul pour nous initier aux univers emboîtés des jeux vidéos, ici trône Saul Tenser, pilier de ce monde, déjà installé et dominateur. Il est la clef de voûte du film de Cronenberg et le réalisateur l’a naturellement confié à son acteur fétiche Viggo Mortensen.

Il y a bien Timlin, admiratrice de l’artiste chargée du recensement des nouveaux organes, laissée à une Kristen Stewart parfaite en intrigante soupirante. Mais celle-ci n’intervient que trop peu dans le film. Caprice, l’assistante et amante de Tenser (interprétée par une Léa Seydoux aussi glacée qu’un personnage d’une BD de Bilal), occupe le terrain, joue les maîtresses de cérémonie. Au début du film, elle fait entrer le jour dans la chambre où se repose l’artiste-gourou. On devine un paysage aride par cette fenêtre ouverte sur un monde extérieur factice.  On comprend alors qu’il nous faudra demeurer dans l’espace clos de leur inframonde, prisonnier de leur dead zone. L’essentiel du film se déroule à l’ombre de décors délabrés, friches dénichées aux alentours d’Athènes, comme ce cimetière de bateaux que Cronenberg filme comme d’immenses léviathans échoués (cette impressionnante épave sur le flanc en ouverture), géants couverts de rouille rendus organiques par la texture de l’image et l’éclairage nocturne savamment travaillé par le chef op’ Douglas Koch : les énormes pneus suspendus au bastingage deviennent les organes externes de ces titans océaniques, leurs coques sont lardées de larges cicatrices, tandis qu’au premier plan, un amas de cordes semble représenter les viscères que l’on aurait arrachées de leurs entrailles.

« Viscéral », jamais peut-être le cinéma de David Cronenberg n’aura aussi bien assumé cet adjectif que dans « les Crimes du Futur ». Il repousse la société du spectacle vers ses limites, plus loin encore que dans « Maps to the Stars », n’exhibant plus seulement les corps, mais l’intérieur des corps, à la recherche d’une prétendue « beauté intérieure ». Déjà exploré par des voies naturelles dans « Faux Semblants », il opte cette fois pour une entrée différente, passant par des entailles dans la chair, des plaies et des implants, endoscopies et incisions abdominales. « Surgery is the new sex ! » est le nouveau mantra de cette société qui succombe volontiers au péché de (nouvelle) chair. A partir d’une technologie composée d’os et de cartilages, Cronenberg invente des tables d’autopsie pilotées à distance, et tout un mobilier délirant (un « Orchidbed », vision kafkaïenne en forme d’norme carapace insectoïde renversée), parfois même comique (cette étonnante chaise instable censée faciliter l’ingestion de nourriture), systématiquement organique (cette télécommande en forme de cervelet qui rappelle le biopod clitoridien dans « eXistenZ »).

Il est pourtant difficile de s’installer confortablement dans ce film qui, à l’instar de « Crash », refuse de mettre le spectateur à l’aise, refusant les codes du thriller, flirtant avec le ridicule (la tenue « ninja sidious » que porte Mortensen), frôlant parfois le pensum (les discours pompeux de Caprice). Il est pourtant fascinant de constater, après une digestion lente de tous ces éléments coagulés, qu’il reste beaucoup à mastiquer, qu’il y a matière à réfléchir sur ce que nous sommes, ce que nous pourrions devenir, sur ce qui fait que nous demeurons des êtres humains, … peut-être.

36 réflexions sur “Les CRIMES du FUTUR

  1. OMG. Désolée mais c’est bien long.
    J’hésitais… un peu. Ton texte m’a confortée dans l’idée de ne pas me déplacer et m’infliger cela. Je rêverais d’explorer le corps de Viggo mais franchement je m’en passerai.
    J’avais détesté Crash et pas beaucoup aimé Existenz. Je ne vois pas en quoi ces manipulations sadiques me feraient réfléchir.
    J’ai préféré aller écouter rugir les F18 et même un dinosaure F14. Et Tom m’a épatée par son humilité et sa sobriété. 3 décennies lui ont permis de ne plus tout miser sur le machisme.

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    • Pas la peine la peine de te faire souffrir, vu effectivement ton allergie à d’autres expériences corporelles du Canadien. Et Viggo est plus porté sur le don d’organes que sur le charme viril dans ce film.
      Pas encore décollé avec le Tomcat, mais je l’ai mis sur mon plan de vol.

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  2. Trop de Caprice, pas assez de Kristen et franchement, prendre Viggo pour lui masquer le visage les 9/10e du temps… Cro est franchement un sadique. Qui continue de ricaner allègrement depuis Map of the Stars. Autant revoir les films d’avant, Videodrome, Existenz et le Festin Nu. Au moins, là, tout le monde rigolait de concert.
    De toutes manières, Orlan a déjà tout inventé non ?

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    • Orlan, Stelarc, Bacon, Kafka, Gina Pane, il y a beaucoup de chaires intellectuelles impliquées dans ces « Crimes du Futur ». Dans cette alchimie des corps et des viscères, Cronenberg n’est tout de même pas maladroit, et le film se tatoue tranquillement dans la mémoire. Ce serait plutôt dans l’écriture qu’il s’écoute un peu trop le Canadien. Le privilège de l’âge sans doute : plus rien à faire de ce qu’on attend de lui.

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      • Il a déjà tout fait et en mieux, (Et pour être honnête ce n’est pas très malin pour le marketing de coller la pub Vuitton juste avant le film… on en peut déjà plus)

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        • C’est ce qu’on disait aussi de « eXistenZ », manière de remake de « Videodrome ». Et pourtant, à chaque fois, il y a toujours un cordon ombilical qui nous relie au temps présent, et le plaisir de retrouver à nouveau ce chair Cronenberg.

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    • Bonsoir Marie-Anne,
      « les Crimes du Futur » n’est pas à proprement parlé un film sanguinolent, et ce n’est pas véritablement un film d’horreur comme on le présente parfois. Il a cependant un regard cru sur le corps, et use d’artifices pour en faire un objet de narration, de réflexion et d’expérimentations. On se souvient que l’an dernier Julia Ducournau emprunta des voies similaires dans « Titane » et s’en revint avec une Palme d’or. Il faut croire que les audaces de l’élève ont été préférées à celles du maître.
      Mais je comprends que ces films ne soient pas du goût de tous.

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  3. Cronenberg et ses obsessions tournant autour du corps humain et de ses déformations, ce n’est pas ma tasse de thé ; pour s’intéresser à un réalisateur, il faut aussi s’intéresser à ses thèmes ou se sentir un minimum d’atomes crochus avec sa vision du monde. Je passe moi aussi mon tour sur ce film.

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    • Chez Cronenberg, c’est autant le corps que la psychologie qui sont le cœur de ses films. On se souvient de l’emprise mentale des Scanners, où du gourou interprété par Oliver Reed sur Samantha Eggers. On l’a vu aussi creuser la pensée de Jung qui jouait un jeu dangereux avec sa patiente.
      On retrouve tous ces motifs dans « les Crimes du Futur », sous forme d’une fable assez étrange sur une possible métamorphose de l’humain dans un monde kafkaïen. Et bien sûr, cela passe aussi par l’évolution des corps.

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  4. Ah, le voilà enfin ton texte sur ces ‘Crimes du Futur’. 🙂 Très bonne chose et je te rejoins sur le ressenti général.
    J’ai lu cette semaine (après avoir vu le film donc) l’interview de Cronenberg dans le Mad Movies de mai. Il y expose effectivement des points de vues passionnants sur le monde, l’art, l’humain, la technologie… Dommage que son film ne s’adresse la plupart du temps qu’à son petit monde intérieur, et pas beaucoup aux spectateurs. Où est l’émotion ? Dans certaines scènes les personnages s’échangent des clins d’oeil, des bons mots. Le personnage de Léa Seydoux sourit souvent (bien moins froide pour le coup que la Femme Piège d’Envi Bilal). Et les spectateurs alors, tu les oublies David ? Dans l’interview, le journaliste de Mad essaie de montrer qu’il est lui aussi un « cérébral », qu’il a compris le propos du réalisateur par exemple en s’arrêtant sur la scène de performance que tu décris : un danseur recouvert d’oreilles sur le corps (il a le surround ?). Et dans l’interview, Cronenberg coupe le journaliste pour lui dire que dans cette scène il fallait juste y voir une touche d’humour de sa part. Même des journalistes peuvent tomber dans le piège de la surinterprétation. Vouloir à tout prix voir du sens dans le moindre petit détail est une prétention très répandue en France. Un collègue africain m’avait dit, quand j’étais étudiant : « c’est de la branlette intellectuelle ». Bien vu. Moi-même j’étais tombé dans ce travers dans un cours sur Fellini et ça m’a servi de leçon pour la suite de mon amour du cinéma.

    Bref, pour revenir à David Cronenberg, je reverrai sans doute ces ‘Crimes du futur’ tranquillement plus tard. Histoire de bien être certain de comprendre son propos qui est loin d’être clair. C’est quand même très important ça. Car cinématographiquement, je ne pense pas qu’il ait encore des choses nouvelles à proposer. J’ai eu l’impression de voir par moment un « best of » Cronenberg. Dès le début j’ai eu une idée de la fin du film et du destin de Saul Tenser. Et sur le fond ? Ce Canadien avec qui j’ai grandi film après film, est-il toujours bien pertinent avec notre époque ? Il fut un prophète du temps des ‘Vidéodrome’ et ‘Scanners’. Son propos est-il en phase avec ce que nous préparent les Gafam et grands laboratoires chinois, américains… ou bien Cronenberg est-il resté sur une vision subversive et romantique du monde des années ’60, mais aujourd’hui datée ? Vaste débat.

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    • Wow, beaucoup de choses dans ce commentaire, comme quoi le Canadien peut susciter scepticisme voire déception, mais il alimente toujours autant réflexions et débats passionnants sur ses thématiques.
      Je te rejoins d’abord sur le fait que ce film propose une revisite de ce que Cronenberg a déjà proposé auparavant. Mais comme je l’écrivais en préambule en évoquant « Spider », il me semble que tous les films du réalisateur sont ainsi connectés, et doivent à mon sens, pour ceux qui comme nous avons arpenté son œuvre de bout en bout, se concevoir comme un grand tout. Et si le scénario semble anachronique, c’est peut-être parce qu’il a été écrit vingt ans auparavant. « C’est le monde tel que je le vois » disait encore en substance le réalisateur lors de la promo, vision à prendre ou à laisser pour le spectateur. J’aime assez cette indépendance d’esprit qui a toujours été la sienne. On peut regretter que cette vision ne soit pas davantage en prise directe avec les technologies actuelles ou avec les enjeux politico-économiques. A moins qu’ils ne soient bien présents, mais masqués sous ces oripeaux de SF organique. Mais qu’importent finalement ces artifices qui peuvent en effet ressortir d’un romantisme désuet, seul le corps, la matière qui le compose, sa capacité à s’adapter, prévalent dans ce script. Body is Reality. Et ce postulat, tellement présent dans ses précédents films, n’aura jamais été aussi fermement affirmé et démontré que dans « les Crimes du Futur ».
      Peu, voire pas d’émotion, c’est très juste. Mais tu admettras que Cronenberg n’a jamais été un grand sentimental, en dehors des élans hollywoodiens de « la Mouche ». Son regard est toujours très clinique, aussi froid que le chrome des carrosseries de « Crash », aussi détaché que les protagonistes du « Festin Nu ». Personnellement, je regrette davantage que le script soit si flou, traversé d’intrigues assez secondaire et inutiles (on se fiche bien de ces « Crimes du Futur » finalement, et de leurs conséquences au regard de la « loi »).
      On peut interpréter cette séquence de danse comme on le veut : Cronenberg a la sienne, très ironique, celle du journaliste de Mad se vaut tout autant me semble-t-il. J’aime aussi projeter ma propre grille de lecture sur les images : j’y vois personnellement une manière de discréditer une forme d’expression artistique superficielle (ces oreilles greffées, ces yeux et bouche cousus) pour mieux creuser de son côté bien plus en profondeur, comme il l’a toujours fait.
      Quand on aime le travail de Cronenberg, qu’on a partagé son univers, on n’est jamais réellement déçu il me semble.

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      • Je ne dirais pas déçu, mais peut-être que pour moi David Cronenberg n’est plus aussi indispensable qu’il a pu l’être par le passé. Il a une oeuvre incontestable derrière lui.
        Il n’en va pas de même pour l’autre David que j’adore. Non non, je ne pense pas à celui qui nous a quitté (excellent documentaire cannois). Je veux bien entendu parler du père Lynch. 😉

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        • L’autre David aussi tourne toujours autour des mêmes lubies et ressasse les mêmes motifs. Il s’est quelque peu mis en retrait néanmoins. Comme l’avait d’ailleurs prévu Cronenberg, qui s’était plutôt tourné vers sa première passion : l’écriture. Ce dernier a visiblement repris goût au cinéma puisqu’il travaille actuellement sur « shrouds » avec Vincent Cassel.

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  5. Cronenberg est toujours passionnant, mais ce film semble un peu un melting-pot de ces anciens films. Kristen Stewart est sous-exploitée en effet, comme les « techniciennes » qui auraient dû être plus essentielles à l’intrigue, mais on peut aussi s’étonner du manque de sang malgré des « opérations » qui seraient forcément très sanglantes

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  6. Tu m’avais fasciné avec ton sur « Crash » et c’est toujours le cas ici ! Je n’ai pas encore eu le courage de regarder le premier, mais je compte bien me rattraper avec celui-ci 😉 Je devais le voir mardi, malheureusement je suis tombée malade, donc j’espère pouvoir choper la seule séance de mon cinéma local, à la fin du mois !

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    • Tomber malade pour un rendez-vous avec Cronenberg ! on est en plein dans la thématique corporelle, bravo !
      Je te souhaite de ne pas le manquer à la fin du mois, d’autant plus si les arguments que j’ai déployés n’ont pas refroidi tes ardeurs.
      En tout cas, merci pour ta lecture et ton commentaire. Je surveillerai de près la publication de ressenti.

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