L’amant diabolique

« Il n’y a guère que le sadisme qui donne un fondement dans la vie à l’esthétique du mélodrame. »
Marcel Proust
1866, la terre tremble en Italie. Le peuple se réveille, se soulève contre l’occupant autrichien. Une nation trop longtemps morcelée, dominée, renaît peu à peu de ses cendres, prend les armes pour conduire son destin. Au cœur du tumulte, une aristocrate vénitienne, la Comtesse Livia Sarpieri, confie dans son journal les feux de la passion qui la brûlent, déchirée entre sa fibre nationaliste et une obsession sans issue pour un jeune officier ennemi. La symphonie du mélodrame sur fond historique chante jusqu’aux oreilles de Luchino Visconti, encore sous le charme des arias de la Callas qu’il avait admirée peu auparavant depuis sa loge de la Scala. Le cinéma devient alors pour lui le parfait médium pour exalter la grâce, la puissance et la gloire du spectacle total, celui de la vie (« la vie est un champ de bataille » disait-il), de ses drames intimes et de ses tragédies grandioses. Ce fut l’avènement de « Senso », première grande fresque en costume signée du Prince de Modrone dont les immenses tableaux en couleur se consument avec toujours autant de violence et de passion. Lire la suite