NOSFERATU, fantôme de la nuit

De la puissance et des ombres

nosferatu-fantome-de-la-nuit-1

« Alors, ô ma beauté ! dites à la vermine
Qui vous mangera de baisers,
Que j’ai gardé la forme et l’essence divine
De mes amours décomposés ! »

Charles Baudelaire, « une charogne », in Les fleurs du Mal, 1857.

Le Mal se répand. Il anéantit les êtres, il pétrifie les âmes. Partout sur la planète, des plus hautes cimes jusqu’aux gouffres insondables, il étend son noir manteau de froideur tissé durant les nuits millénaires. S’il est un cinéaste qui s’est fixé pour quête d’en saisir la substance, c’est bien Werner Herzog. De tous temps, il chercha à repousser les limites du rêve, bâtisseur d’opéra à travers les jungles, conquistador fiévreux remontant le cours des ténèbres, marchant « sur le chemin des glaces » ou plongeant vers les mystères rupestres antédiluviens, on pourrait le croire à la solde de l’Outre-tombe, âme damnée du côté sombre. Ses films sont des enfants de la nuit, et sa dévotion première va vers leur père à tous, le « Nosferatu » de Murnau. Sur la toile initiale, il glisse un palimpseste spectral, entre respect et profanation, dans lequel le non-mort se change en « Nosferatu, fantôme de la nuit ». Lire la suite

Une Vie Cachée

Gott mit uns

une-vie-cachee-2

« Contre vents et marées, savoir se maintenir. »

Goethe.

Par-delà les nuages qui nimbent les cimes des montagnes du Tyrol, se dissimulent au regard des hommes une rivière, des bois, des prairies, des champs, quelques vaches et autres moutons, un village, de la vie. « Une vie cachée ». Et c’est donc là-haut que, naturellement, Terrence Malick a emporté sa caméra pour s’élever vers l’incommensurable, y capter le sublime, et tenter de comprendre le mystère qui fit qu’autrefois un homme choisit de ne pas s’abandonner à la folie des autres. Lire la suite

SPORT de FILLES

Ride Lonesome

Sport-de-filles-1

« J’ai toujours voulu savoir monter à cheval, mais mon destin en a décidé autrement. Enfant, mes parents ne pouvaient pas m’offrir des cours d’équitation.  Ils étaient beaucoup trop chers. Une  fois devenu acteur de  théâtre et de cinéma,  il m’était  interdit par contrat de pratiquer des sports dangereux. La seule fois où je suis vraiment monté à cheval, c’était sur  le tournage du NOSFERATU de Werner Herzog. Un après-midi, Werner  a  soudain  voulu  profiter  d’un  beau  ciel  pour me  filmer  à cheval. J’ai fait 10 mètres et je suis tombé. »

Bruno Ganz (22/03/1941 – 16/02/2019)

Le film d’équitation est un genre assez particulier du cinéma français. Déjà dans les années cinquante, Yves Allégret faisait tourner « manèges » pour pouvoir faire tourner en bourrique Bernard Blier face cette pouliche volage et cabocharde de Simone Signoret. Mais les temps ont changé et deux écuries se distinguent désormais de ce cadre noir (mettons à part la vision historique du genre « Michael Kohlhaas »). Il y a d’abord celle des bêtes à concours comme « Jappeloup » et son Canet bourriquet qui fait hennir les ménagères. Et de l’autre il y a Patricia Mazuy, qui préfère le « sport de filles » pour pouvoir ruer dans les brancards. Lire la suite