Le Troisième Homme

Qui a tué Harry ?

« Oui, j’ai aimé travailler avec Carol Reed pour « le Troisième Homme ». Il appartient à l’espèce la plus rare des metteurs en scène : ceux qui aiment la caméra et faire jouer les acteurs. Très peu de réalisateurs sont capables d’autant d’enthousiasme. »

Orson Welles in Positif n°54-55, juillet-août 1963.

Il faut vivre, et laisser mourir. C’est tout au moins ce que prétend un roman de Ian Fleming mis en images par Guy Hamilton. Celui-ci en sait quelque chose, lui qui fut assistant de Carol Reed sur le tournage du « Troisième Homme ». Une bien sombre affaire en vérité, qui nous renvoie dans les décombres d’une Vienne en ruine, un de ces secrets que le célèbre agent aurait sans doute eu à cœur de percer : des funérailles inattendues, un odieux trafic de médicaments, une inquiétante galerie de complices, un machiavélique maestro qui tire les ficelles et un cadavre qui ressuscite. Mais attention, « on ne vit que deux fois ! » aurait pu dire le double zéro. Lire la suite

La SPLENDEUR des AMBERSON

La maison dans l’ombre

« L’autre jour, je revoyais un extrait de « La Splendeur des Amberson » que j’aime bien car je voulais revoir une actrice, Agnès Moorehead, qui venait du Mercury Theatre ; je voulais réécouter le son de sa crise de larmes. Ce sont des pièces historiques ces morceaux de cinéma, c’est de l’archéologie. Comme un musée imaginaire dans lequel on déambule. Parfois, on conserve certaines images, certaines émotions et en revoyant le film c’est moins fort ; là, c’était vraiment aussi fort que dans mon souvenir. »

Jean-Luc Godard in La Septième Obsession n°28, mai-juin 2020.

Dans le champ de ruines abandonnées dans le sillage de la tumultueuse Histoire du cinéma, on trouve ça et là quelques fabuleux monuments qui rayonnent encore d’une aura magnifique. Du haut de son promontoire de reconnaissance, règne sans partage « Citizen Kane » sur l’œuvre d’Orson Welles, ne laissant que bien trop faiblement entrevoir dans son prolongement immédiat « la Splendeur des Amberson ». Ce film tourné immédiatement après, fut mutilé à la table de montage, ravagé dans sa durée, jusqu’à être défiguré par la volonté des studios qui exigèrent une autre fin, mais il conserve néanmoins l’élégance grave des plus beaux films d’Orson Welles, éminemment viscontien avant l’heure. Lire la suite

MANK

Ars gratia artis

« Si l’on se demande comment se fait qu’Herman J. Mankiewicz, qui a écrit le film que beaucoup de gens pensent être le plus grand film qu’ils aient jamais vu, est presque inconnu, la réponse doit certainement être non seulement qu’il est mort trop tôt, mais qu’il s’est dupé lui-même. »

Pauline Kael, Raising Kane, New Yorker, février 1971.

Son nom est Orson Welles. Il est inscrit dans toutes les anthologies du cinéma pour être l’auteur du plus grand film de tous les temps, « Citizen Kane ». Pour avoir écrit le scénario de ce chef d’œuvre, il remporta la prestigieuse statuette dorée offerte par l’Academy of Motion Picture and Science, récompense qu’il partagea avec un certain Herman J. Mankiewicz, autrement connu sous le diminutif « Mank ». C’est à cet homme de l’ombre, ainsi qu’à son propre père, que David Fincher rend hommage en réalisant ce film, une traversée du miroir vers la face sombre du fastueux âge d’or hollywoodien. Lire la suite