DOCTOR STRANGE in the Multiverse of Madness

« L’impétueuse furie de la rafale nous enleva presque du sol. C’était vraiment une nuit d’orage affreusement belle, une nuit unique et étrange dans son horreur et sa beauté. »

Edgar Alan Poe, La Chute de la Maison Usher, 1839 (traduction de Charles Baudelaire).

« Are you happy ? » La question se pose dans notre monde plus près que jamais du grand chaos. Plus notre monde se recroqueville, plus l’univers cinématique de la Marvel semble occuper le terrain de la poudre aux yeux. Une mission : divertir, détourner le regard de la morosité ambiante. Et avec le rapatriement de la totalité du catalogue de personnages autrefois dispersés aux quatre vents, la Maison de Idées peut enfin voguer au gré de ses envies, pourvu que les spectateurs suivent. Alors que l’on croyait venu le bout de la ligne narrative à l’occasion d’une fin de partie homérique, voici que se déploient d’autres possibles esquissés dans le « No way home » de Spider-Man. Mais à force de multiplier les cases, le risque est d’en perdre quelques-unes en route. Tandis que le monde chancelle sur son pied de réalité, on en appelle au « Docteur Strange in the Multiverse of Madness », et on met Sam Raimi sur le grill pour voir si le charme agit. Lire la suite

DUNE (1984)

Prophétique Jihad

« — Ta religion peut-elle donc être réelle quand elle ne te coûte rien et ne comporte aucun risque ? Est-elle réelle dès lors que tu t’engraisses sur elle ? Est-elle réelle alors que tu commets des atrocités en son nom ? D’où vient que vous ayez dégénéré depuis la révélation originale ? Réponds-moi, Prêtre ! »

Frank Herbert, Les enfants de Dune, 1976.

Dans le passionnant documentaire de Frank Pavich « Jodorowsky’s Dune », l’artiste franco-chilien revenait sur ce moment où, pour faire son deuil, il s’était résolu à aller voir en salle le film réalisé par David Lynch, et contempler ce qui aurait dû être sien. Il évoque d’abord son dégoût de voir son inspiration galvaudée par un autre, puis sa crainte de se voir surpassé par un jeune cinéaste doué, et enfin son sourire et son soulagement à mesure que les scènes se succédaient à l’écran. « C’était horrible ! » lâche-t-il à demi-hilare. « Dune » de David Lynch ne serait donc pas ce chef d’œuvre SF qui devait chambouler l’ordonnancement de l’univers. Ce qui est plus surprenant, c’est que ce jugement lapidaire et définitif, le réalisateur du film n’est pas loin de le partager également. « Je considère ce film comme un échec tragique » peut-on lire dans un hors-série des Inrocks. Et c’est peu dire que la presse lui emboîtera le pas, invitant la plupart des spectateurs à passer au large de cette « adaptation éléphantesque ». Lire la suite

LOGAN

Serval

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« SNIKT ! »

Mark Millar in « Wolverine 71 », 2003

Voilà des siècles que les fusils terrorisent les pauvres fermiers installés dans les vallées perdues. Seront-ils sauvés par la venue d’un homme providentiel surgi d’une chanson de Johnny Cash ? Le « Logan » envoyé par James Mangold n’est pas ce « Pale rider », encore moins un ange libérateur, il n’est qu’un rempart, un passeur, le garant d’une génération qui porte encore un peu d’espoir. Lire la suite