PIERROT le FOU

Rimbaud warriors

« Qu’est-ce que c’est dingue ?
– C’est moi. »

Jean Seberg et Jean-Paul Belmondo dans « A bout de souffle », Jean-Luc Godard, 1960.

Connaissez-vous Pierre Loutrel ? Un type charmant : alcoolique, criminel, brutal et déloyal, il débute une carrière de délinquant dès les années trente avant d’intégrer la Gestapo française et de commettre de nombreux crimes sous brassard nazi. Sentant le vent tourner, il finit par intégrer la Résistance en balançant quelques agents doubles. Après la guerre, il se fait connaître en tant que membre du sinistre « gang des tractions avant », devient « ennemi public numéro un » et rapidement surnommé « Pierrot le Fou ». « Je m’appelle Ferdinand ! » proteste avec véhémence Jean-Paul Belmondo dans le célèbre film signé Jean-Luc Godard. C’est pourtant l’adorable petit nom que lui a trouvé sa dulcinée Marianne au début d’une cavale échevelée et insensée qui débute avec le démon des armes et se termine sur la mer allée avec le soleil. Lire la suite

SHOCK CORRIDOR

La tête contre les murs

« Un reporter n’est pas un dieu ! Il n’est même pas un magnétophone enregistreur, ni un appareil photo. Même une photo peut mentir. Il s’agit de questionner une ombre car le meurtrier est caché dans l’ombre. Il n’existe pas de photo d’un meurtrier : elle est toute noire. »

Samuel Fuller in « La machine à écrire, le fusil et le cinéaste » de Adam Simon, 1996.

Samuel Fuller est un cinéaste qui a toujours été en quête de vérité. Il est allé la chercher dans les poubelles, en tant que reporter des bas-fonds de New York et de San Diego. Il est allé la traquer sur les champs de bataille, au plus près de la mort, dans le sang versé sur les plages de Normandie, de Sicile et d’ailleurs. Il est allé l’apporter à Hollywood, au pays du mensonge, où il en a badigeonné ses films les plus noirs. Il en a tâté la chair avant de comprendre qu’il vivait dans un pays de cinglés, dans la rue sans issue qui s’arrête au « Shock Corridor ». Son film parle de cette quête obsessionnelle, de son pays schizophrène et des idées noires qui s’habillent de blanc. Lire la suite

Le PORT de la DROGUE

L’affaire est dans le sac

« Fuller était le plus franc des contrebandiers des fifties, aucune idéologie n’échappait aux mailles de son filet. L’hypocrisie des Etats-Unis constituait sa cible permanente et ses héros étaient souvent difficiles à distinguer des méchants. »

Martin Scorsese, A Personal Journey with Martin Scorsese Through American Movies, 1995.

Si comme Jean-Paul Belmondo dans « Pierrot le fou » vous avez « toujours voulu savoir ce que c’était exactement qu’le cinéma », il suffit de demander à Samuel Fuller qui vous répondra en quelques mots improvisés : « l’amour, la haine, l’action, la violence et la mort. » On trouvera tout cela dans « le port de la drogue », ou bien « Pick up on South Street » selon que vous soyez plutôt schnouf ou microfilm. Pas une seule ligne de coke pourtant dans le scénario d’origine, mais une clique de cocos qui transpirent à grosses gouttes dans l’Amérique de McCarthy. Ce qui ne change pas en revanche, c’est qu’il y a de l’argent à se faire et dans ces moments-là, Richard Widmark n’est jamais loin. Lire la suite