La CHEVAUCHEE FANTASTIQUE

Ringo unchained

« Je n’ai subi qu’une fois l’influence de quelqu’un : avant de tourner Citizen Kane, j’ai vu quarante fois La Chevauchée fantastique. »

Orson Welles

Ceux qui ont fait le voyage jusqu’à la frontière entre Arizona et Utah, au plein cœur du parc naturel de Monument Valley, ont pu admirer le panorama grandiose depuis un point précis appelé John Ford Point. C’est là que, il y a des décennies, le grand réalisateur plaça sa caméra pour mieux embrasser ces merveilles d’Amérique, grandes cathédrales de schiste et de grès qui font l’arrière-plan idéal à la construction d’un mythe de cinéma : celui du Far-West. Pour sillonner cette vaste étendue minérale et majestueuse, il utilise un moyen de transport rudimentaire, un frêle esquif brinquebalant tiré par un attelage à six chevaux, véhicule tout tracé pour une « Chevauchée Fantastique », le temps d’un film fondateur qui sera le berceau d’une star. Lire la suite

La SPLENDEUR des AMBERSON

La maison dans l’ombre

« L’autre jour, je revoyais un extrait de « La Splendeur des Amberson » que j’aime bien car je voulais revoir une actrice, Agnès Moorehead, qui venait du Mercury Theatre ; je voulais réécouter le son de sa crise de larmes. Ce sont des pièces historiques ces morceaux de cinéma, c’est de l’archéologie. Comme un musée imaginaire dans lequel on déambule. Parfois, on conserve certaines images, certaines émotions et en revoyant le film c’est moins fort ; là, c’était vraiment aussi fort que dans mon souvenir. »

Jean-Luc Godard in La Septième Obsession n°28, mai-juin 2020.

Dans le champ de ruines abandonnées dans le sillage de la tumultueuse Histoire du cinéma, on trouve ça et là quelques fabuleux monuments qui rayonnent encore d’une aura magnifique. Du haut de son promontoire de reconnaissance, règne sans partage « Citizen Kane » sur l’œuvre d’Orson Welles, ne laissant que bien trop faiblement entrevoir dans son prolongement immédiat « la Splendeur des Amberson ». Ce film tourné immédiatement après, fut mutilé à la table de montage, ravagé dans sa durée, jusqu’à être défiguré par la volonté des studios qui exigèrent une autre fin, mais il conserve néanmoins l’élégance grave des plus beaux films d’Orson Welles, éminemment viscontien avant l’heure. Lire la suite