the HOST

Et au milieu coule une rivière

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« – Vous êtes sans doute surpris, dit l’homme, de notre peu d’hospitalité. Mais l’hospitalité n’est pas d’usage chez nous, nous n’avons pas besoin d’hôtes. »

Franz Kafka, Le Château, 1926.

De la source à l’estuaire, le fleuve se gorge et se nourrit de ce qu’il charrie du fond de son lit. Il s’enrichit, se vitalise, prend de l’ampleur, gagne du débit, s’ouvre un passage vers l’horizon, vers la consécration. La carrière du cinéaste Bong Joon-ho semble avoir emprunté un trajet similaire. Film après film, son succès et son aura à l’international n’auront cessé de croître, de gagner le respect de la critique et du public. Alors, qui mieux qu’un cinéaste palmé pour nous plonger dans les eaux troubles de Séoul, saisissant « The Host » par la queue d’un genre encore inédit au sud du 38ème parallèle ?

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PARASITE

La ligne de démarcation

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« Et la maison était merveilleusement distribuée : des grands espaces vides, soigneusement conçus, s’emboîtaient sans heurt pour donner l’illusion qu’elle était encore plus vaste qu’elle ne l’était en réalité. (…) Le fantôme n’a pas vu le moindre détritus de la fête souillant la maison. C’était immaculé. »

Brett Easton Ellis, Lunar Park, 2005.

La fracture. S’il y a bien un pays qui en mesure les conséquences c’est bien la Corée. Politique et idéologique, celle-ci est depuis longtemps inscrite au patrimoine mémoriel du Nord et du Sud, dans l’ADN de chaque citoyen qui sait qu’à tout instant, le ciel peut lui tomber sur la tête. Mais depuis quelques temps, depuis l’essor économique de la moitié fréquentable de la péninsule, s’ajoute une fracture sociale, sourde et souterraine, qu’auront su ressentir nombre d’artistes autochtones. L’excellent Bong Joon-ho est de ceux-là. Descendu du wagon qui transperçait neige, le voici de retour sur ses terres, toujours au pied des inégalités, dans une traque au « Parasite » qui s’avère féroce et jouissive.

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OKJA

Copain comme cochon

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« Il fait de l’anémie ? Mais bouffez-le votre cochon ! Bouffez-le ! »

Christian Clavier dans « les Bronzés font du ski », Patrice Leconte, 1979

Cinquante millions de Coréens, et lui, et elle, et moi. Tant de bouches à nourrir, tant de consommateurs à satisfaire, tant d’estomacs à rassasier. La population de la planète enfle comme les bides à bière des Américains et les ressources viennent à manquer. Immanquablement. Dans les années soixante-dix, on avait anticipé cette situation, et inventé in extremis le « Soleil Vert ». Aujourd’hui, c’est Bong Joon-ho qui trouve la solution à nos appétits viandards, et c’est son film « Okja » qui nous la donne. Lire la suite