DUNE, 2ème partie

Le retour du Jihad

« Que l’illuminé se fasse des disciples aussi nombreux que le sable de la mer ; le sable est du sable.
Sois pour moi la perle, ô toi, mon judicieux ami ! »

Johann Wolfgang von Goethe, Epigrammes vénitiens, 1790.

Et de deux. Le roulement percussif de Hans Zimmer pétarade, le rideau s’ouvre sur un désert enveloppant. Il aura fallu beaucoup de patience pour passer de « Dune, 1ère partie » à « Dune, 2ème partie ». Cette nouvelle épopée toujours conduite par Denis Villeneuve, retrouve Paul là où elle l’avait abandonné presque trois ans plus tôt. Ceux qui n’avaient pas saisi l’épice du film précédent n’en trouveront sans doute guère davantage à leur goût dans cette seconde partie. Les autres, initiés ou convertis, pourront en revanche se régaler de cette chronique d’un mythe, en suivant l’éveil d’un leader qui vire à l’avènement d’un tyran, et tenter de percer le cœur de ver de Paul Muad’Dib, les desseins intérieurs de Celui Qui Nous Conduira Au Paradis. Lire la suite

GLASS ONION

The walrus was Paul

« Une mer calme, dit Poirot d’un ton définitif, est une chose qui n’existe pas. La mer, ça bouge toujours. Toujours ! »

Agatha Christie, Les vacances d’Hercule Poirot, 1941.

Rian Johnson est visiblement un homme heureux. Après ses égarements dans la SF temporelle, après avoir assassiné « les Derniers Jedis », le voici désormais aux manettes d’une franchise dont il ne soupçonnait sans doute pas le potentiel. « A couteaux tirés » fut le succès surprise de 2019, misant sur son casting de prestige et sa façon toute particulière de revisiter les codes poussiéreux du whodunit. Exfiltrant une fois encore Daniel Craig de sa retraite d’agent secret, il s’apprête à faire de nouvelles révélations dans « Glass Onion », les Beatles et Bowie comme bande-son haut de gamme et le soleil pour témoin. Lire la suite

DUNE, 1ère partie

Rêve de sable

« Si l’on accepte le cinéma comme une passerelle entre le monde des songes et la réalité, et que ce rêve éveillé que propose l’adaptation de « Dune » s’inspire du roman et des trajectoires que nous avons collectivement empruntées, comme Frank Herbert, je ne peux qu’anticiper avec crainte les violences qu’inspirera une nature finalement acculée au pied du mur. De toute évidence, si nous ne modifions pas notre trajectoire, comme Paul Atréides, il nous faudra apprendre à nager dans des eaux étranges. »

Denis Villeneuve, préface de « Dune » de Frank Herbert, Robert Laffont, 2021.

« Tell me of your homeworld, Usul »

Chani in « Dune » de David Lynch, 1984.

Sous le sable ondulant du désert, nul ne sait la teneur du péril qui nous guette. Observant les effets des sables conquérants de l’Oregon, l’écrivain Frank Herbert avait préféré diriger sa plume vers un ciel rempli d’étoiles. De son regard perçant, il a entrevu un futur, celui d’une humanité déchirée par des enjeux de pouvoir, des ambitions galopantes, mais aussi l’espoir d’un réveil salvateur sur une planète asséchée de toutes parts. Le jeune Denis Villeneuve s’est saisi de ce rêve inscrit dans une Bible orange, il s’en est fait le film dans sa tête. Après des décennies de campagnes hallucinogènes, de conquêtes avortées, de voyages immobiles, de calendriers contrariés, le soleil se lève enfin sur Arrakis, l’ombre immense de « Dune » enfin nous submerge. Lire la suite

AVENGERS : Endgame

Les héros meurent aussi

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« Fini, c’est fini, ça va finir, ça va peut-être finir (un temps). Les grains s’ajoutent aux grains, un à un, et un jour, soudain, c’est un tas, un petit tas, l’impossible tas. »

Samuel Beckett, Fin de Partie, 1957.

« Zeus, donne-lui ton trône. Il y a un vrai patron parmi les dieux maintenant. »

Joann Sfar, hommage à Stan Lee

On les avait laissés vaincus, traumatisés, dissous aux quatre coins de la galaxie, dans la sidération la plus absolue face à ce terrifiant constat d’échec : les héros n’ont pas toujours gain de cause. A la fin d’« Avengers : Infinity War », un titan fou adepte du new deal universel, un dieu auto-proclamé aux pouvoirs infinis tenant le destin de la création au revers de son gant avait, en un claquement de doigts, remporté le match, obtenu satisfaction. C’était fait, plié, page tournée, ashes to ashes, « Avengers : Endgame », à moins qu’Anthony et Joe Russo n’aient trouvé un moyen de rejouer la partie. Lire la suite

AVENGERS : Infinity war

Mauvaises nouvelles des étoiles

Avengers-Infinity-War-Thanos

« Cependant, à d’innombrables années-lumière de là, aux marges de l’infini, une voix se fait entendre :
– ça va mal ! La Mort a un bien meilleur jeu que nous, Lord Chaos ! Nous devons lancer nos derniers atouts !
– Nous donneront-ils la victoire, Master Order ? Thanos n’a encore jamais eu un jeu aussi fort ! »

Jim Starlin, to duel a mad god, Marvel two-in-one annual #2, 23/08/1977.

Voilà dix ans maintenant que le Marvel Cinematic Universe a entamé sa grande saga, semant de film en film, de cycle en cycle, les petits et gros cailloux qui conduisent au grand ramdam débarquant sur les écrans : « Avengers : infinity war ». Première mi-temps d’un affrontement cataclysmique dont l’enjeu n’est ni plus ni moins que la survie de l’univers, il ne fallait pas moins de deux réalisateurs pour mettre en ordre de bataille cette monumentale fresque composite faite d’éléments épars. Reste à savoir qui de Anthony ou Joe Russo saura le mieux recoller les morceaux. Lire la suite

Les GARDIENS de la GALAXIE

 

Un raton dans l’espace

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De plus en plus, l’univers cinématographique de Marvel ressemble à un puits sans fond. C’est comme un trou noir, pareil à celui qui, au centre de la voie lactée, engloutit toute forme de matière et de lumière : il aspire, broie et digère tous les talents qui passent à sa portée. Depuis que Bryan Singer a retrouvé le génome originel des super-héros au début des années 2000, cet univers n’a plus cessé son expansion, augmentant toujours plus ses budgets jusqu’à atteindre une rentabilité record en réunissant l’armada de ses petits soldats au sein des « Avengers ». Afin d’animer cette spirale tentaculaire de héros aux capacités toujours plus impressionnantes, la maison mère n’a pas hésité à recruter tous azimuts : des vieux spielbergiens nourris de nostalgie commémorative (Joe Johnston pour « Captain America : first Avenger ») comme des gardiens du temple shakespearien (Kenneth Branagh qui s’est pris le marteau de « Thor » en pleine poire), pour privilégier dans sa phase 2 des recrues formatées à l’écriture plus télévisuelle (Alan Taylor et Joss Whedon en particulier). Captées par l’onde gravitationnelle de la maison Mickey au sourire crispé, toutes ces précieuses étoiles exigeaient d’être dûment protégées par « les Gardiens de la Galaxie ». Lire la suite